Le régime concessionnaire, préconisé dès 1890, ébauché entre 1893 et 1895 avec la création de la Société du Haut-Ogooué (SHO) et la Société d'études et d'exploitation du Congo français, fut définitivement établi à partir de 1899 au Congo français : la phase d'exploration terminée, il s'agissait désormais de mettre en exploitation un territoire que l'on voulait concurrent du Congo belge voisin, grâce à des compagnies à monopole destinées à assumer les investissements dont l'État refusait la charge.Un décret et un cahier des charges type, qui ne devaient pas contrevenir aux décisions de la conférence de Berlin, furent préparés par une Commission consultative sur les demandes de concession
Constituée par décret le 16 juillet 1898;
et complétés par la circulaire ministérielle du 24 mai 1899 : sur un territoire concédé, à l’exclusion des mines encore à découvrir et sans délégation de souveraineté, étaient accordés par contrat pour une durée de trente ans tout droit de jouissance et d’exploitation agricole, forestière et industrielle. En échange de ces prérogatives, étaient prévus le dépôt d'un cautionnement et le versement annuel à la Colonie d'une redevance fixe calculée sur la superficie de la concession et d'un pourcentage de 15 % sur les bénéfices réalisés. Le concessionnaire devait également participer à l’établissement des postes de douane ou à la construction de lignes télégraphiques rendus nécessaires par ces opérations, à l'entretien d'une flotte de vapeurs sur son réseau fluvial et à la plantation d'au moins cent cinquante pieds de plantes à caoutchouc par tonne exportée. En fin de contrat, les terres mises en valeur par ses soins devenait sa propriété pleine et entière. Les Africains conservaient les villages qu’ils occupaient et un droit de jouissance sur les terres de forêt, de pâturage et de culture qui leur étaient « réservées ». Les mœurs, coutumes, organisation et religion locales devaient être respectées. L'abus contre les travailleurs, le commerce d’armes prohibées, la négligence ou l'abandon de la concession étaient sanctionnés par une mise en demeure suivie, le cas échéant, d’une procédure de déchéance
Dès 1901, était institué un Commissariat spécial du Gouvernement près les sociétés concessionnaires, chargé de contrôler l'exécution du cahier des charges.
.Entre 1899 et 1900, quarante sociétés se partagèrent 70 % du territoire. La plus petite, la Société de la N'Kéni et N'Kémé, recevait 1 200 km
2 et la plus grande, la Compagnie des Sultanats du Haut-Oubangui, 140 000 km
2. Certains concessionnaires étaient des colons déjà établis mais la majorité d'entre eux était liée aux milieux d'affaires belges, les Français s'étant montrés réticents devant les investissements à réaliser.Face à l'immensité et la pauvreté du territoire, la pénurie de matériel, le climat, la végétation et l'insuffisance des capitaux investis, peu réussirent. Quelques sociétés disparurent dès les premières années, d'autres végétèrent un peu plus longtemps, certaines, parce qu'elles avaient su opérer une nécessaire mutation et anticiper la fin de leur monopole, perdurèrent, parfois jusqu'aux indépendances. En 1925, presqu'au terme du contrat, le régime concessionnaire présentait un maigre bilan : "(...) Ces compagnies ont introduit dans le pays un certain capital, mais elles n'ont pas fait réaliser les progrès économiques qu'on escomptait. L'exploitation trop intensive du caoutchouc a épuisé plusieurs régions sans que rien de sérieux (...) ait été fait pour renouveler les peuplements (...) ; quant aux tentatives de ces maisons pour mettre en œuvre de nouvelles ressources, elles n'avaient jamais dépassé le stade des velléités ; en somme, les sociétés concessionnaires ont laissé le pays aussi pauvre qu'elles l'avaient trouvé"
Cité par Catherine Coquery-Vidrovitch, Le Congo au temps des grandes compagnies concessionnaires 1898-1930, Mouton et Cie, Paris, 1972, page 281.
.Voir la carte des concessions en 1900 parue dans
La Dépêche coloniale (s.d.).